Le 6 septembre 1939, le premier train de réfugiés haut-rhinois à destination des communes d'accueil du Tursan dans le sud des Landes, s'immobilise en gare d'Aire-sur-l'Adour. Le surlendemain, les autorités enregistrent 6 800 arrivants supplémentaires en gare de Morcenx et de Labouheyre et 8 500 pour la seule journée du 8 septembre. Un mois plus tard, les Landes auront reçu 25 000 Alsaciens, une infime partie des 600 000 réfugiés venus des régions frontalières du Haut-Rhin, du Bas-Rhin, de la Moselle mais presque chaque village du département va voir sa population augmenter d'un tiers et plus. Des difficultés de ces premières semaines et des mois qui suivirent, les Archives départementales des Landes ont conservé une abondante mémoire : enquêtes effectuées auprès des mairies, rapport des contrôleurs de l'hébergement, correspondance des Alsaciens... Au fil des dossiers on découvre une volonté commune, pas si désordonnée qu'on a pu le dire, de trouver des solutions qui s'imposaient alors pour loger, ravitailler, soigner, éduquer une population alsacienne qui ne resta pas inactive de son coté et sut montrer une grande dignité dans l'adversité. Les hommes et les femmes de cette mobilisation générale apparaissent dans leur diversité, fonctionnaires des services de l'État, parlementaires, élus locaux, mais aussi le monde engagé des instituteurs, des médecins, des ecclésiastiques sans oublier les plus anonymes, petits propriétaires et gens du peuple sans qui les multiples visages de la solidarité n'auraient pu s'exprimer aussi complètement. Grâce aux efforts de tous, la vie quotidienne put s'organiser avec son lot d'inquiétudes, de frustrations mais aussi de petits bonheurs. On apprit à se découvrir, à s'entraider, et finalement à s'apprécier. Les 35 jumelages réalisés à ce jour entre les Landes et le Haut-Rhin, les rencontres annuelles qui en font la joie, les rues et les places rebaptisées en l'honneur de la commune soeur, les échanges scolaires sont bien là, soixante-dix ans plus tard, pour rappeler que "toutes les détresses sont finalement vaincues par l'amitié".